Sagot :
Réponse:
En entrant dans la chambre, Roubaud posa sur la table le pain d’une livre, le pâté et la bouteille de vin blanc. Mais, le matin, avant de descendre à son poste, la mère Victoire avait dû couvrir le feu de son poêle, d’un tel poussier, que la chaleur était suffocante. Et le sous-chef de gare, ayant ouvert une fenêtre, s’y accouda.
Le participe présent ” en entrant ” indique que l’action n’est pas terminée. Zola emploie le passé simple (temps de l’action dans le passé par opposition à l’imparfait, temps de la description)
Il s’agit d’un incipit in medias res, qui plonge le lecteur au coeur de l’action.
L’énumération de denrées alimentaires (pain, pâté, bouteille de vin blanc) inscrit le texte dans une veine naturaliste : prêter attention aux détails pour donner une image fidèle de la réalité, de manière quasi scientifique (Zola comparait le romancier au savant).
L’incipit nous donne des indications sur le cadre spatio-temporel :
le temps de l’action : la référence à un ” poêle” laisse supposer que nous sommes en hiver
l’espace : champ lexical qui renvoie à un intérieur modeste (poêle, pâté)
Le groupe nominal ” et le sous-chef de gare ” renseigne le lecteur sur le métier du personnage principal.
L’imparfait (la chaleur était étouffante) est le temps de la description : il s’agit de décrire l’ambiance de la pièce de manière réaliste.
C’était impasse d’Amsterdam, dans la dernière maison de droite, une haute maison où la Compagnie de l’Ouest logeait certains de ses employés. La fenêtre, au cinquième, à l’angle du toit mansardé qui faisait retour, donnait sur la gare, cette tranchée large trouant le quartier de l’Europe, tout un déroulement brusque de l’horizon, que semblait agrandir encore, cet après-midi-là, un ciel gris du milieu de février, d’un gris humide et tiède, traversé de soleil.
L’imparfait ” c’était ” annonce un passage descriptif.
L’auteur nous livre des indications sur :
1) le lieu où se déroule l’action, par une juxtaposition de compléments circonstanciels de lieu.
L’énumération qui localise la fenêtre prouve une attention naturaliste aux détails et à l’architecture (” au cinquième, toit mansardé “).
Zola recourt à la métaphore (” trouer ” et ” agrandir “) pour désigner la place de la gare dans la ville et l’horizon.
La répétition du terme gris permet de préciser la description.
2) le contexte temporel : mois et moment de la journée.
La juxtaposition du nom ” gris ” et des adjectifs ” humide et tiède ” qui renvoient davantage la météo qu’à une couleur, est étonnante. La grisaille pourrait annoncer l’ambiance du roman (qui se passe dans un espace industriel) ou ses ressorts tragiques).
En face, sous ce poudroiement de rayons, les maisons de la rue de Rome se brouillaient, s’effaçaient, légères. À gauche, les marquises des halles couvertes ouvraient leurs porches géants, aux vitrages enfumés, celle des grandes lignes, immense, où l’œil plongeait, et que les bâtiments de la poste et de la bouillotterie séparaient des autres, plus petites, celles d’Argenteuil, de Versailles et de la Ceinture ; tandis que le pont de l’Europe, à droite, coupait de son étoile de fer la tranchée, que l’on voyait reparaître et filer au- delà, jusqu’au tunnel des Batignolles.
Les compléments circonstanciels de lieu ” en face “, ” à gauche ” et les noms propres ” Argenteuil, Versailles ” permettent au lecteur de se repérer par rapport à la fenêtre et à la ville de Paris.
La métaphore du ” poudroiement de rayons ” pour désigner le temps montre que la description naturaliste n’est pas purement scientifique : elle comporte aussi une dimension littéraire et poétique.
Les maisons sont presque personnifiées lorsque Zola leur associe l’adjectif ” légère “.
Le pont est également personnifié, décrit comme ” coupant ” la tranchée.
Recours à l’hyperbole avec les ” porches géants “, les ” lignes immenses ” : il s’agit de faire ressentir l’immensité du quartier industriel.
L’adverbe de lieu ” au-delà “ prolonge la description et met l’accent sur la taille de la capitale.
Le ” on ” inclusif ” on voyait ” permet d’inclure le lecteur dans la scène décrite et de rendre plus vivante la description.
Le champ lexical est celui de l’urbain.
Et, en bas de la fenêtre même, occupant tout le vaste champ, les trois doubles voies qui sortaient du pont, se ramifiaient, s’écartaient en un éventail dont les branches de métal, multipliées, innombrables, allaient se perdre sous les marquises. Les trois postes d’aiguilleur, en avant des arches, montraient leurs petits jardins nus. Dans l’effacement confus des wagons et des machines encombrant les rails, un grand signal rouge tachait le jour pâle.
La conjonction de coordination ” et ” est une surenchère dans la description : comme si l’espace était si immense qu’il était impossible d’en livrer une description brève et concise.
Les participes présents ” occupant “, ” montraient ” donnent l’impression au lecteur de se trouver devant le paysage. La description est neutre et objective.