aurait-il
aimé recevoir Jeff
Koons en son châ-
teau ? Oui, si l'on en
croit Jean-Jacques
Aillagon. Le président du
domaine de Versailles, an-
cien directeur du Centre
Pompidou et prédécesseur
de Christine Albanel au mi-
nistère de la Culture, a ou-
vert le palais du Roi-Soleil
au kitschissime Américain,
fils spirituel de Duchamp et
de Warhol.
Jeff Koons, 53 ans, l'un des
artistes les plus médiatiques
du moment, adulé des col-
lectionneurs milliardaires et
champion olympique des
enchères (Balloon Flower,
une fleur en ballon de bau-
druche, a été adjugé 16 mil-
lions d'euros par Christie's,
en juin dernier), a donc ins-
tallé 15 de ses sculptures
monumentales dans l'enfi-
lade des grands apparte-
ments. Lobster, son homard
Lobster, le homard géant en aluminium polychrome créé par Jeff Koons
(2003), est accroché dans le salon de Mars du château de Versailles.
géant en aluminium poly-
chrome, a été accroché dans
le salon de Mars, à la place
d'un lustre (voir photo), tan-
dis que Rabbit, le lapin
d'acier, et Pink Panther, une
panthère rose de porcelaine
enlaçant une femme blonde.
K
introduction de l'art contemporain
dans les musées anciens et les lieux
tendance. Surfant sur l'engouement
pour la création moderne, le musée d'Orsay
et le Louvre invitent régulièrement, depuis
2004, des plasticiens à se confronter à leurs
propres collections. De nombreuses autres
institutions, à Paris ou en province, déve-
loppent aussi cette politique, érigée parfois
en stratégie. Car elles espèrent étendre
trônent respectivement
dans les salons de l'Abon-
dance et de la Paix.
L'intrusion des loufoque-
ries koonesques dans les dé-
cors de Charles Le Brun
porte certains nerfs à vif.
C'est prévisible. Au cœur de
Cette argumentation
séduira sans doute les ico-=
noclastes, mais a peu de
Le mélange des genres est « tendance»> chances de convaincre les
et
détracteurs, qui ne peuvent
s'empêcher de glisser
qu'avant d'être nommé à
Versailles Jean-Jacques Ail-
lagon fut directeur du Pa-
lazzo Grassi, à Venise, pro-
priété de l'industriel Fran-
çois Pinault, grand collec-
tionneur de... Jeff Koons. ●
Annick Colonna-Césari
Jeff Koons Versailles. Château
de Versailles (Yvelines). Du 10 sep
tembre au 14 décembre.
Malraux avait introduit
Chagall à l'Opéra
La Société des amis de Ver-
sailles, forte de 6 000 mem-
bres, refuse, elle, de partici-
per à la polémique, mais
attend néanmoins avec
quelque appréhension les
réactions du public. << Pré-
server le patrimoine ne si-
gnifie pas le plonger dans la
naphtaline », rétorque Jean-
Jacques Aillagon, qui note
des affinités entre l'univers
baroque de Jeff Koons et
l'exubérance de la résidence
royale. « L'art déteste les pré-
jugés et les catégories ».
poursuit-il, vantant les
mérites du dialogue entre
les époques et rappelant que
Malraux lui-même avait
commandé des plafonds
peints à Chagall pour
l'Opéra Garnier et à André
Masson pour le théâtre de
l'Odéon.
et renouveler, par ce biais, leur fréquenta-
tion, afin, notamment, d'attirer le jeune
public, souvent ignorant de la culture
classique. En cette rentrée, le château de
Fontainebleau, associé au palais de Tokyo,
se lance dans l'aventure (du 7 septembre
au 17 novembre) en conviant 12 artistes
à « réactiver avec ironie sa dimension histo-
rique ». Etienne Bossut, l'un d'eux, sera éga-
lement l'invité du musée Rodin (du 15 octo-
bre 2008 au 22 février 2009). ● A. C.-C.
quidetom
ceso