Sagot :
Réponse :
voici une texte qui pourrais t'aider
Explications :
Lorsqu’Aguingueron le vit, il se fit armer en toute hâte et s’avança vers lui à vive allure sur son cheval
vigoureux et bien nourri. Il lui dit:
«Jeune homme, qui t’envoie ici? Dis-moi la raison de ta venue: viens-tu chercher la paix ou la bataille?
-Mais toi-même que fais-tu sur cette terre? fit Perceval. Tu me le diras d’abord. Pourquoi as-tu tué les
chevaliers et ruiné tout le pays?»
Alors l’autre lui répondit avec orgueil et outrecuidance :
«Je veux qu’aujourd’hui on m’abandonne le château et qu’on me rende la tour qu’on m’a trop longtemps
refusée, et mon seigneur aura la jeune fille.
-Maudites soient aujourd’hui ces paroles, dit le jeune homme, ainsi que celui qui les a dites! Il te faudra
plutôt renoncer à tout ce que tu lui disputes.
-Mensonges que tout cela, par saint Pierre, fit Aguingueron. Il arrive souvent que tel paie pour une faute
sans y être pour rien.»
Le jeune homme en eut alors assez. Il mit la lance en arrêt, et ils s’élancèrent l’un contre l’autre sans
se défier ni s’adresser la parole. Chacun disposait d’une lance au fer tranchant et à la hampe robuste.Les
deux chevaux étaient rapides et les chevaliers puissants. Ils se haïssaient à mort. Ils se frappèrent si fort que
craquaient les bois de leurs boucliers qui se brisèrent en même temps que les lances, et qu’ils se jetèrent l’un
l’autre à terre. Mais ils eurent tôt fait de se remettre en selle et de se précipiter l’un contre l’autre, sans
paroles inutiles, plus férocement que deux sangliers. Ils se frappèrent sur leurs boucliers et sur leurs hauberts
aux fines mailles de toute la force de leurs chevaux. Emportés par la colère et la rage, de toute la puissance
de leurs bras, ils firent voler les morceaux et les éclats de leurs deux lances. Aguingueron fut le seul à
tomber, le corps couvert de blessures au point qu’il avait mal au bras et au côté. Le jeune homme mit pied à
terre, car il ne savait l’attaquer en restant à cheval. Une fois descendu, il tira l’épée et l’assaillit. Je ne puis
vous en raconter davantage, ni ce qui arriva à chacun, ni tous les coups l’un après l’autre: il reste que la
bataille dura longtemps et que les coups furent très violents, jusqu’à ce qu’Aguingueron tombât, et le jeune
homme l’attaqua si vigoureusement qu’il cria grâce.[…]
«Sais-tu donc où tu iras? lui dit Perceval. En ce château-là et tu diras à la belle demoiselle qui est
mon amie que jamais plus de toute ta vie tu ne chercheras à lui nuire, et tu te mettras sans réserve,
totalement, à sa merci.»
Chrétien de Troyes, Perceval ou le Conte du Graal,
traduction de Jean--‐ Dufournet, Flammarion, 2001