Sagot :
Bonjour regarde un peu cela
Je sais bien que, parfois, nous voudrions retourner à la nature brute, mais à la condition expresse de pouvoir emporter des vêtements en textile synthétique, une carte de crédit, un téléphone portable et un sac à dos rempli d’antibiotiques.
Ainsi s’exprime le paradoxe de notre rapport au progrès : nous prétendons ne plus y croire, mais nous tenons encore à lui farouchement, même si ce n’est plus que de façon négative, c’est-à-dire en proportion de l’effroi que nous inspire l’idée qu’il puisse s’interrompre.
Aujourd’hui, un fait social total s’impose : nous avons peur. Je n’ai pas encore dit que nous avons peur de la science, j’ai simplement dit que nous avions peur d’une façon générale. D’abord, le futur inquiète : nous sommes assaillis par toutes sortes de craintes concernant l’avenir. Mieux, par un remord anticipateur à l’égard de ce qui pourrait se produire. On me rétorquera que l’avenir a toujours fait peur, mais il me semble qu’il y a une différence essentielle : l’avenir nous inquiétait hier parce que nous étions impuissants, il nous effraie aujourd’hui par les conséquences de nos actes que nous n’avons pas les moyens de discerner. Nous sentons que notre maîtrise des choses est à la fois démesurée et incomplète : suffisante pour que nous ayons conscience de faire l’histoire, insuffisante pour que nous sachions quelle histoire nous sommes effectivement en train de faire.