Sagot :
Bonsoir,
L'absence totale de limite et de subordination ne peut pas simplement résumer la liberté. En effet, dans un exemple primaire et à la base de la liberté, Spinoza note la forme illusoire que peut prendre la liberté, il dit en effet que "Nous connaissons, ou nous croyons connaître nos désirs. De ce fait nous nous croyons libres, c'est-à-dire maîtres de nous-mêmes. Mais le fait d'épouser nos propres inclinations ne saurait être un gage de liberté". On voit donc ici le sens le plus primaire de la liberté qui est remis en cause. Le sentiment de liberté serait créé à la suite de la connaissance de ses désirs et à l'exécution de ceux-ci. Mais selon lui, si l'homme se contente d'exprimer sa liberté par l'assouvissement de ses désirs, il se retrouve tôt ou tard soumis à eux. On ne peut donc considérer que la liberté est réellement une absence totale de contraintes. Elle renverrait l'homme à l'état animal, celui qui n'agit que selon sa volonté, sans restriction et n'étant limité dans le choix de ses actions que par son instinct de survie. L'homme ne peut donc se résoudre à exprimer sa liberté par l'assouvissement de ses désirs, il se doit de discerner ce qui est possible ou non, mais ceci n'étant pas en opposition totale à l'expression de sa liberté. D'ailleurs, Épictète critique lui aussi la tendance de l'homme à penser que toute chose qui l'empêche d'assouvir ses désirs va à l'encontre de sa liberté, alors que les sages pensent que les aléas de l'existence (et donc les contraintes) ne doivent pas détourner l'homme de son objectif, le bonheur. Quoique puissent-être les contraintes, l'homme serait donc à même de par sa volonté et sa liberté de réussir sa vie. La liberté serait donc pour lui un moyen de réussir sa vie et non pas de se soumettre à chacun de ses désirs ou à ceux des autres. Le sentiment de liberté peut donc n'être qu'une illusion dans bien des cas. Qu'est ce-qui différencie une personne soumise à une autorité pensant être libre d'une personne libre pensant être soumise ? Comment des êtres libres peuvent-ils se soumettre les uns aux autres ?
C'est ici la perception de l'un et de l'autre qui définit sa propre liberté. Ils déterminent leur liberté en prenant comme référence des concepts et des valeurs communs, ou tout simplement selon leur bon entendement. Chacun se fait donc sa propre opinion de la liberté. De plus, au delà de la conception personnelle de la liberté, il y a les lois qui interviennent. La loi est définie par une règle, une norme ou une obligation qui émane d'une autorité souveraine et qui s'impose à tous les individus d'une société. On comprend donc que dès que l'individu choisit la vie de société, il s'expose à des contraintes dont il ne peut choisir si elles l'affecteront ou non. Il y est obligé et ne peut s'y soustraire. La loi entrerait donc en opposition avec la définition de la liberté qui exprime la capacité à choisir ce qu'on l'on juge nécessaire ou non. C'est d'ailleurs pour cette raison que Rousseau dit "L'homme est né libre, et partout il est dans les fers". Il exprime par là que l'homme naît donc avec son libre arbitre et la liberté, et qu'en entrant dans la société il se retrouve "emprisonné" ou en tout cas dans l'obligation de se conformer aux lois et règles en vigueur. L'homme n'a donc pas le choix, et l'on pourrait confronter cette absence de choix à une opposition à la liberté et c'est pourtant tout le contraire puisque Rousseau une nouvelle fois montre qu'opposer la loi à la liberté n'est pas le bon raisonnement.
La liberté ne serait pas l'absence totale de limites, mais pas non plus une soumission à quoique ce soit. La liberté consiste à choisir les règles en adéquation avec sa pensée, tout en restant dans un esprit de respect et non pas d'obligation qui s'apparenterait à la soumission. La notion de liberté peut donc varier d'un individu à l'autre en fonction de sa perception. L'homme décide donc du cadre dans lequel il va vivre et exercer sa liberté, tout en maintenant le respect de celle des autres. Néanmoins, à partir d'où et jusqu'où peut-on parler de liberté puisque c'est une notion qui diffère d'un individu à l'autre.