Emile Zola, Thérèse Raquin. 1867 Thérèse Raquin est le premier grand roman d'Émile Zola (1842-1902), auteur naturaliste du XIXème siècle. Elle a été publiée en 1867. Ce roman raconte l'histoire de deux amants, Laurent et Thérèse, rongés par la culpabilité d'un meurtre commis sur l'ex mari de Thérèse, Camille. L'extrait qui suit correspond aux premières lignes du récit. Au bout de la rue Guénégaud, lorsqu'on vient des quais, on trouve le passage du Pont-Neuf, une sorte de corridor étroit et sombre qui va de la rue 3 Mazarine à la rue de Seine. Ce passage a trente pas de long et deux de large, au plus, il est pavé de dalles jaunâtres, usées, descellées, suant toujours une humidité âcre; le vitrage qui le couvre, coupé à angle droit, est 6 noir de crasse. Par les beaux jours d'été, quand un lourd soleil brûle les rues, une clarté blanchâtre tombe des vitres sales et traîne misérablement dans le 9 passage. Par les vilains jours d'hiver, par les matinées de brouillard, les vitres ne jettent que de la nuit sur les dalles gluantes, de la nuit salie et ignoble. A gauche, se creusent des boutiques obscures, basses, écrasées, 12 laissant échapper des souffles froids de caveau. Il y a là des bouquinistes, des marchands de jouets d'enfant, des cartonniers, dont les étalages gris de poussière dorment vaguement dans l'ombre; les vitrines, faites de petits 15 carreaux, moirent étrangement les marchandises de reflets verdâtres; au- de là, demière les étalages, les boutiques pleines de ténèbres sont autant de trous lugubres dans lesquels s'agitent des formes bizarres. À droite, sur toute la longueur du passage, s'étend une muraille contre laquelle les boutiquiers d'en face ont plaqué d'étroites armoires; des objets sans nom, des marchandises oubliées là depuis vingt ans s'y étalent le long 21 de minces planches peintes d'une horrible couleur brune. Une marchande de bijoux faux s'est établie dans une des armoires; elle y vend des bagues de quinze sous, délicatement posées sur un lit de velours bleu, au fond d'une 24 boîte en acajou. 18 Proposition de plan de commentaire : 1. D'une part ce texte installe le réalisme 1) une description très détaillée 2) un narrateur témoin omniscient II. D'autre part il crée une ambiance désagréable 1) Tout semble vieux ou sale 2) Le lieu est angoissant