Sagot :
Réponse:
Paraboles réfléchissantes, cônes rétrac-
tiles, surfaces aspirantes, œuvres miroirs
concaves et convexes… Les sculptures
polymorphes d’Anish Kapoor, qui tantôt
renvoient la lumière, tantôt l’absorbent,
éprouvent notre perception habituelle de l’espace.
Composées de pigments en poudre, de cire, de fibre de
verre, d’acier miroir, de ciment ou de béton, les œuvres
du sculpteur indien se jouent des contraires, du vide et
du plein, de l’intérieur et de l’extérieur, repoussant les
frontières entre peinture et sculpture, sensible et maté-
riel, féminin et masculin.
Anish Kapoor est né à Bombay en 1954, d’une mère
irakienne de confession juive et d’un père hydrographe
de la marine indienne, de confession hindoue. Après un
séjour dans un kibboutz en Israël, il s’installe à Londres dans les années 1970, pour poursuivre ses études
(Hornsey College of Art, puis Chelsea School of Art).
Il y travaille aujourd’hui encore. Depuis les an-
nées 1990, il crée des formes énigmatiques et sensuelles,
intimes et gigantesques, à la fois contemporaines et très
anciennes. Son œuvre monochrome, vide et pleine de
toutes les possibilités d’un monde qu’elle avale ou re-
tourne, est une expérience qui imprègne l’espace phy-
sique comme l’espace mental.
Artiste indien vivant à Londres ou bien artiste bri-
tannique d’origine indienne ? Anish Kapoor se dit « en
exil, là ou là-bas ». Il n’a d’attache que le doute qui
l’anime lorsqu’il conçoit ses projets, dans son atelier de
Camberwell, véritable « berceau méditatif de l’œuvre » et
« lieu d’expérimentation », où une vingtaine d’assistants
apportent leur expertise technique.
« Douter est une fragilité et une force. C’est ce qui me
permet d’aborder de nouveaux territoires, de rompre avec
ce que je connais et ce que je sais de moi – un homme, un
père, un mari… Alors, je peux m’approcher au plus près de
ce que je ne sais pas. L’art est un questionnement sur nos
origines, notre conscience, notre devenir », dit Anish Ka-
poor, récompensé en 1991 par le prestigieux Turner
Prize, élu membre de la Royal Academy en 1999, et fait
commandeur de l’ordre de l’Empire britannique en
2003. Loin de chercher à réconcilier Orient et Occident,
il a gardé de l’Inde natale son rapport à la couleur, sa
fascination pour les monochromes irradiants ainsi que
son aptitude à s’interroger sur notre présence au monde.
Des Guggenheim de Berlin et Bilbao à la Biennale
de Venise, du Grand Palais aux jardins du château de
Versailles, ses œuvres in situ, éphémères ou perma-
nentes, défient toute mesure, invitent à se perdre dans
l’espace pour vivre une expérience sensorielle.
L’échelle est primordiale. « Je cherche à inventer un
objet qui ne soit pas un objet. Un objet inconfortable, trop
grand, trop complexe à appréhender d’un seul regard, qui
peut nous faire vaciller et qui, par chance, sollicite notre
mémoire primordiale. L’art n’est pas fait pour être plaisant
et docile », sourit Anish Kapoor. L’œuvre, comme
l’homme, demeure mystérieuse, durablement mysté-
rieuse. Quoi de plus enviable ?