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Sagot :

Bonjour

Quelle que soit la définition qu'on lui donne, la vérité reste toujours de l'ordre du discours, du langage, c'est-à-dire qu'elle est dépendante de l'homme. Le sens commun aborde la question avec un discours disant que chacun est unique par un tempérament, un caractère qui lui est propre (issu de l'expérience ou ancré en nous, faisant partie de notre "nature"). De plus, l'idée de vérité implique, et sous-entend pour beaucoup, l'idée d'un cheminement, d'une recherche personnelle ce qu'on retrouve notamment chez Platon dans la pratique de la maïeutique (technique qui consiste à faire "accoucher les esprits" de leurs connaissances, à faire exprimer un savoir caché en soi). De là, on peut alors défendre l'idée d'une vérité personnelle (de l'ordre de l'individualité) car elle résulte d'une réflexion intime menée par chacun et elle ne peut donc échapper à l'influence du caractère, du tempérament, de l'expérience... en somme, à l'influence des particularités de chaque être humain.

Les sciences sont une application évidente du raisonnement pour trouver la vérité car c'est grâce à la logique qu'elles aboutissent à une conclusion (qui nous apparaît alors comme irréfutable). En effet, comment ne pas être d'accord avec un mathématicien qui annonce que l'hypoténuse de tel triangle rectangle est de trois centimètres après qu'il ait rigoureusement appliqué le théorème approprié ? L'atout des sciences est qu'elles s'appuient sur la logique, le pragmatisme, c'est-à-dire, sur des éléments qui font appel au bon sens et à la raison et que l'on ne peut donc réfuter à part en faisant preuve de "mauvaise foi" ou d'un pur esprit de contradiction.

Toutefois, on ne peut écarter l'esprit de contradiction qui, légitimement, pose la question du pourquoi. Pourquoi dit-on qu'une droite est un alignement infini de points ? Qu'est-ce qu'un point ? Pourquoi ? Les mathématiques, par exemple, ont pour origine essentielle des postulats, c'est-à-dire des affirmations données arbitrairement par on ne sait quel scientifique qui aurait proposé une règle qui convenait à on ne sait quelle majorité qui en a décidé ainsi. Quelle utilité ont alors les sciences pour trouver la vérité si leurs bases mêmes et la vérité de ces bases sont invérifiables ?  Une vérité scientifique ne peut être prise pour une vérité absolue mais on peut cependant s'en contenter à défaut de mieux (on sait par exemple que les formules de la loi de l'attraction universelle énoncées par Newton ne sont pas exactes – et au XIX° siècle, jusqu'à Einstein, on s'oppose à cette loi – mais on n'a pas encore trouvé de solution pour remédier à cette inexactitude).

Trouver la vérité par les sciences reviendrait alors à une sorte de vérité par consensus. C'est l'un des aspects de la philosophie de Protagoras. Sur chaque sujet, il y a un discours fort : celui de la majorité, et un discours faible : celui de la minorité. C'est donc l'opinion de "la masse" qui devient vérité (c'est le principe même de la démocratie : la majorité l'emporte). Mais quelle légitimité donner à une vérité dans laquelle tout le monde ne se retrouve pas? De plus, la raison a elle-même ses limites : elle fait partie de l'humain donc, peut-on la considérer comme fiable ? Cela pose problème puisque si l'on veut prouver que la raison est fiable, on va devoir s'appuyer sur un raisonnement (faire une démonstration) qui va faire appel à la raison... faire appel à la raison pour prouver qu'elle est fiable alors que l'on remet sa fiabilité en doute ne peut aboutir à aucune conclusion. Cela remet donc en doute la légitimité et la fiabilité de la recherche de la vérité par le raisonnement, par la logique. De plus, si l'agencement des termes d'une affirmation est logique, celle-ci peut ne pas être conforme à la réalité et ne peut donc pas être vraie.

On ne peut trouver de réponse définitive à la question "Peut-on dire ' à chacun sa vérité ?"  puisqu'on ne peut trouver ni de définition définitive et universelle de la vérité, ni de moyen définitif et universel de trouver la vérité. Cette question présuppose également qu'on ne peut connaître la vérité, qu'il n'y a pas de vérité universelle.  On peut également comprendre cette question dans le sens d'une finalité de la vie. Peut-on dire que chacun a un but dans la vie qui lui est propre, que chacun peut avoir sa vérité sur le chemin à emprunter pour accéder au but ultime qu'il s'est fixé ? Enfin, on peut aussi relativiser la perception commune de la vérité en tant que valeur morale dominante. N'y a-t-il pas d'autres valeurs morales à suivre, à atteindre ?

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