Sagot :
Bonjour
L’être humain est libre, mais parce qu’il n’est pas au monde "comme un empire dans un empire", il est contraint de s’engager, c’est-à-dire d’insérer son action dans un monde de phénomènes entièrement régis par les lois de la causalité. Il peut arriver qu’il éprouve la tentation de renoncer à sa liberté tant le poids de sa responsabilité peut peser lourd, trop lourd, sur ses épaules. Ce renoncement peut emprunter deux voies différentes, qui, tout en s’opposant, se rejoignent dans la même hypocrisie. L’individu, affichant un refus catégorique de l’engagement, peut s’en remettre au hasard et se livrer corps et âme à l’arbitraire. Mais alors il feint d’ignorer que son refus de l’engagement est déjà en soi un engagement à part entière même s’il s’agit de la forme d’engagement la plus lâche qui soit. A l’opposé, l’individu peut vouloir s’engager, c’est-à-dire s’enfoncer, si bien dans la brèche de sa fonction sociale, de sa situation professionnelle ou familiale, qu’il n’ait plus à faire de choix, qu’il n’ait plus à sentir à tout instant le poids écrasant de sa responsabilité en tant qu’être pour soi qui a la charge de s’inventer. Mais alors il feint d’ignorer qu’il n’est pas sa fonction, qu’il n’adhère pas à sa situation, que tant qu’il existe il ne peut être rien de fixe et d’immuable.
Enfin, entre ces deux écueils, une troisième voie se dessine, celle d’un engagement qui, au lieu d’abolir la liberté, la réalise. Etre libre, c’est se libérer des déterminismes étrangers à sa propre volonté en cherchant à se déterminer soi-même toujours davantage. Plus on s’engage véritablement dans son existence, plus on est soumis à sa propre nécessité intérieure, et plus on est authentiquement libre.