Sagot :
Réponse :
Elden se présenta devant la dernière porte du donjon du château d’Oriflea, ses longs cheveux blonds dégoulinant de transpiration. Elle avait le visage rougi par l’effort. Elle se demandait de nouveau pourquoi elle avait accepté cette quête stupide.
— Tout ça pour un prince incapable et idiot qui me ralentira dans ma carrière de chasseuse de monstres.
Elle prit une dernière bouffée de l’air putride qui stagnait dans les escaliers du donjon et poussa à deux mains la lourde porte de bois. Une odeur soufrée dégoûtante frappa son visage. Il faisait chaud, très chaud, dans la grande pièce circulaire à colonnades éclairée par des flambeaux rougeoyants.
Elden entra en agrippant fermement son bâton de sorcière. Une brise fraîche, provenant du fond de la salle, courut agréablement dans ses cheveux. Elle avait à peine fait quelques pas qu’un rugissement lui fit se tourner sur le côté. Un gros lion à deux têtes, au poil roux et reluisant la fixait de ses yeux couleur émeraude. Sous sa peau, Elden pouvait apercevoir la musculature saillante, prête à bondir.
Elle levait son bâton et entamait une incantation à voix basse. Elle voulait invoquer le Rhem, le plus puissant sort qu’elle connaissait à ce jour, et qu’elle n’avait pratiqué qu’en entraînement. Une boule de glace commença à grossir à l’extrémité de son arme qui lui givrait les doigts jusqu’aux phalanges.
Elden recula de quelques pas. L’attaque détruirait une bonne partie du donjon et rendrait sûrement instable la totalité de l’édifice. Quitte à se jeter dans le vide, elle le ferait d’elle-même. Elle détestait l’imprévu depuis toujours.
Le lion se mit à courir sur elle. Sa langue de serpent apparaissait par intermittences entre ses babines baveuses. Des étincelles jaillissaient de ses narines dilatées. Confiante, Elden attendait que la bête approche davantage. Elle aimait regarder ses ennemis droit dans les yeux avant de les anéantir.
Son Rhem mesurait maintenant un mètre de diamètre et étincelait d’une teinte bleutée semblable à la topaze.
Ce fut à la seconde où elle allait jeter son sort qu’elle l’aperçut, passant derrière le lion, une tasse de café à la main. Il était blond, chatoyant, lumineux, avec son diadème de pierres précieuses posé négligemment sur la tête. Le prince de Simongfeld était vêtu d’un simple peignoir et de chaussons couinant sous ses pas. Une barbe de trois jours lui cernait joue et menton.
Déstabilisée par cette présence charmante, et ne voulant pas risquer de tuer celui qui devait devenir son époux, Elden annula précipitamment son Rhem. La boule de givre explosa dans un nuage de fumée blanche et la gueule monstrueuse de la bête parut par-delà la brume.
L’animal la renversait et plantait ses crocs acérés dans son bâton de sorcière qu’elle avait brandi par réflexe. Sa bave gluante lui coulait dans la bouche tandis qu’elle tentait de le repousser de toutes ses forces.
Elden sentit son arme se rompre sous le poids du monstre quand soudain...
À cet instant, Georges lève le front de sa feuille noircie de phrases pour regarder sa montre. 14 heures. Par la fenêtre, le temps est morne. La pluie s’abat avec régularité sur le dôme blanc du Capitole des États-Unis. L’auteur s’étire, satisfait de sa journée de travail. C’est chose rare qu’il complète les trois-quarts d’un chapitre en une matinée.
— Allez, pas plus, sinon l’imagination s’étiole, se répète-t-il en éteignant l’écran de son ordinateur.
L’averse tambourine sur le velux de la cuisine comme une symphonie. Il remet sa vieille théière qui embaume la menthe sur le feu lorsqu’un pincement le saisit au cœur. Il sert les dents pour retenir les larmes qui menacent de couler.
Demain, il devra finalement abandonner Elden après une aventure de huit cents pages. Car demain, il tuera de ses propres mains la puissante sorcière qu’il avait aimée le temps d’une histoire.
Explications :
sa te va?