Sagot :

Réponse :

Explications :

LE GRAAL ET LA CHEVALERIE

Les romans du Graal offrent cette complexité d'être à la fois des romans de chevalerie et des romans religieux; certes la présence simultanée des deux inspirations — la chevaleresque et la religieuse — n'a rien d'exceptionnel au moyen âge, mais cette union des deux courants prend dans les fictions du Graal un caractère singulier. Si l'on a spéculé beaucoup sur les rapports du Graal, ou plutôt du Saint-Graal, avec la liturgie et avec la théologie, non sans excès de subtilité, alors qu'il s'agit le plus souvent de vérités fondamentales enseignées par le catéchisme, peut-être n'a-t-on pas prêté une attention suffisante à nombre de traits qui ne sont point sans lien avec la théologie, mais appartiennent surtout au domaine de la psychologie. Ces traits sont convergents et tendent à créer un assemblage indissoluble de la chevalerie et de la religion. En les rapprochant j'ai- eu le sentiment d'avoir saisi un fil conducteur capable de guider à travers une littérature assez dédaléenne et de faire mieux comprendre la genèse et le développement du thème du Graal. Je ne me flatte pas d'être le premier à découvrir ce fil conducteur; on l'a entrevu, mais on n'a fait à son propos, çà et là, que des remarques éparpillées. Le dessein s'est donc formé dans mon esprit d'une étude plus méthodique où j'essaierais d'établir que, dans les romans du Graal, même dans ceux qu'anime le plus l'élan mystique, ceux-là surtout peut- être, la religion n'a guère cessé d'être exaltée en fonction de la classe des chevaliers, et dans l'intention précise d'exalter cette classe elle-même. C'est ce fait de psychologie collective que je voudrais examiner. Le sujet est vaste, il se nuance et se diversifie d'un roman à l'autre; je ne vise ici qu'à l'esquisser en