Sagot :
Il était une fois une fée, une gentille petite
fée, qui vivait dans une source, pas très loin d'un village Vous savez,
n'est-ce pas, que la Gaule autrefois n'était pas chrétienne, et que nos pères
les Gaulois adoraient les fées. A cette époque, les gens de ce village
adoraient cette fée-là. Ils portaient à la source des fleurs, des gâteaux et
des fruits, et même, les jours de fête, ils mettaient leurs plus beaux habits
pour y venir danser.
Et puis un jour, la Gaule devint chrétienne, et monsieur
le curé interdit aux gens du pays de porter des offrandes et de venir danser
autour de la source. Il prétendait qu'ils y perdraient leurs âmes, et que la
fée était un diable. Les villageois savaient bien que ce n'était pas vrai ;
cependant, ils n'osaient rien dire, parce qu'ils avaient peur du curé. Mais les
plus vieux d'entre eux continuèrent de venir, en cachette, pour déposer leurs
dons près de la source. Quand le curé s'en aperçut, il se fâcha tout rouge. Il
fit dresser en cet endroit une grande croix de pierre, puis il organisa une
procession et prononça au-dessus de l'eau un tas de paroles magiques, en latin,
pour chasser la fée. Et les gens crurent vraiment qu'il avait réussi à la faire
fuir, car, pendant quinze cents ans, plus personne n'entendit parler d'elle.
Les vieux qui l'adoraient moururent, les jeunes
l'oublièrent peu à peu, et leurs petits-enfants ne surent même plus qu'elle
avait existé. Même les curés, ses ennemis, cessèrent de croire en elle.
Pourtant la fée n'était pas partie. Elle était
toujours là, dans la source, mais elle se cachait, car la croix l'empêchait de
sortir. Du reste, elle avait bien compris que personne ne voulait plus d'elle.