Texte 2-L'Orateur doit connaitre lame de l'auditeur
Le langage demande une maitrise, c'est un outil dont il faut user habilement.
L'identification du but à atteindre et la connaissance de l'âme sont utiles. Les Sophistes se
vantaient d'être d'habiles orateurs, capables de persuader quiconque sur tous les sujets.
Platon affirme au contraire qu'une parole habile est celle qui tisse le lien efficacement pour
atteindre le but voulu; le critère de réussite n'est donc pas dans le discours lui-même mais
dans l'expérience intérieure qu'il suscite ou l'échange qu'il produit.
SOCRATE- La vertu du discours étant d'entraîner les âmes, celui qui veut devenir
orateur doit savoir combien il y a d'espèces d'âmes. Elles sont en certain nombre, et elles
ont certaines qualités par lesquelles elles diffèrent les unes des autres. Cette division
établie, on distingue certaines espèces de discours qui ont certaines qualités. Or, on
5 persuade aisément à telles ou telles âmes telle ou telle chose par tels discours, pour tels
motifs, tandis qu'à telles autres il difficile de persuader telle ou telle chose. Il faut qu
l'orateur suffisamment instruit de tous ces détails puisse ensuite les retrouver dans
toutes les actions, dans toutes les circonstances de la vie, et les y démêler d'un coup
d'œell rapide, ou bien il doit se résoudre à n'en savoir jamais plus que ce qu'il a appris de
10 ses maîtres, lorsqu'il suivait leurs leçons. Quand il sera capable de dire quels discours
peuvent opérer la conviction et sur qui, et que, rencontrant un individu, il pourra le
pénétrer soudain et se dire à soi-même, voilà bien une âme de telle nature, telle qu'on
me la dépeignait; la voilà présente devant moi, et pour lui persuader telle ou telle chose,
je vais lui adresser tel ou tel langage; quand il aura acquis toutes ces connaissances, et
is que de plus il saura quand il faut parler et quand se taire, quand employer ou quitter le
ton sentencieux, le ton plaintif, l'amplification, et toutes les espèces de discours qu'il
aura étudiées, de manière qu'il soit sûr de placer à propos toutes ces choses et de s'en
abstenir à temps, il possédera parfaitement l'art de la parole; jusque-là non: et
quiconque, soit en parlant, soit en enseignant, soit en écrivant, oublie quelqu'une de ces
20 règles, et prétend parler avec art, on a raison de ne pas le croire. Eh bien, Socrate; eh
bien, Phèdre, nous dira maintenant notre écrivain, est-ce ainsi ou autrement qu'il faut
concevoir l'art de la parole?
PHEDRE- Impossible autrement, mon cher Socrate, mais cela ne me paraît pas un petit
ouvrage.
PLATON, Phèdre, IVe s. av. J.-C., trad V. Cousin.



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